RSE, Une entreprise responsable
Pouvons-nous faire confiance au bio ?
Existe-t-il encore aujourd’hui un supermarché sans rayon bio ou une ville sans enseigne bio de proximité ? En à peine 3 ans, c’est tout le paysage de la distribution qui a évolué et les produits dits “conventionnels” ont accueillis un nouveau voisin aux apparences de gendre idéal. Une augmentation de marché qui reflète l’ampleur de la résonance du bio auprès des consommateurs. Et ces consommateurs, c’est nous. Nous qui souhaitons offrir une alimentation de meilleure qualité à nos enfants, diminuer l’impact néfaste de la production alimentaire sur l’environnement ou encore contribuer à un monde plus… biotifull. Mais le bio est-il aussi beau qu’il y paraît ? Pouvons-nous réellement faire confiance au bio et son label vert et blanc ou n’est-il rien de plus que le nouveau masque attrayant d’une industrie de surconsommation qui a trouvé un nouveau filon ?
Tant de questions comme celles-ci restent en suspens et autant d’a priori se construisent par-dessus, nourris de la peur de se faire encore avoir les géants de l’industrie, ou manipulés par des messages discordants ou intentions déguisées, qu’il est temps d’y répondre et de réactiver notre bon sens. Consom’acteurs, une utopie il y a 15 ans, une réalité aujourd’hui.
Exigeant et engagé, aujourd’hui, le consommateur est plus sensible aux caractéristiques responsables (englobant également l’éthique, l’équitable et le durable) des produits, et sa consommation est un acte politique : ses achats reflètent ses valeurs.
Alors bio, local, vegan, sans sucre ou encore sans gluten, quelles sont les véritables motivations et engagements derrière ces mouvements galvaudant la consommation conventionnelle ? A l’instar des produits “light” il y a quelques années, le consommateur se pose la question : “bio” est-il synonyme de produit “bon pour la santé” ?
Dans cet article, nous allons décortiquer quelques-uns des a priori sur l’alimentation dite “responsable” et répondre à certaines idées reçues. La lecture est un plus longue que d’habitude mais elle ne manque pas d’intérêt tant la question est d’actualité !
« Le bio est biaisé »
Bien que nous constatons une véritable accélération du développement de la consommation de produits bio — l’agence bio annonce qu’en 2018, plus de 9 Français sur 10 déclarent avoir consommé des produits biologiques et que près des ¾ consomment du bio régulièrement (au moins une fois par mois) —, le bio reste minoritaire et divise. Essayons de comprendre pourquoi.
Le terme bio est un diminutif de « issu de l’agriculture biologique », un mode de culture mettant en avant des techniques agricoles respectant l’environnement et les animaux, avec des engagements et des valeurs dont les principes fondateurs sont : équité, écologie et santé. Parfait, non ?
Cependant, si l’intention est salutaire, il faut savoir que la réglementation bio est un ensemble de textes à la fois complexe et évolutif qui soulève fréquemment des questions d’interprétation. Et une grande question subsiste : y’a-t-il des pesticides dans l’agriculture bio ? Une véritable confusion persiste autour de cette question. Alors, faisons court et direct : oui, l’agriculture biologique utilise des pesticides. Comment ça ? Voici l’explication.
D’abord, rappelons que le mot “pesticide” (qui vient du latin cida, tuer et de l’anglais pest, nuisible) regroupe des substances utilisées en agriculture pour lutter contre des organismes nuisibles aux cultures. Il n’avance donc pas être “mauvais pour la santé”.
Quelles différences avec l’agriculture conventionnelle ? C’est simple : alors que les pesticides et engrais de l’agriculture conventionnelle peuvent être entièrement créés en laboratoire, les intrants utilisés dans le bio doivent être d’origine naturelle. Une centaine d’engrais et d’intrants (pesticides, insecticides ou fongicides) sont ainsi autorisés par la réglementation de l’agriculture bio en France et en Europe. Elle inclut des matières comme le compost et le fumier mais aussi d’autres produits tels que le phosphate aluminocalcique, le sulfate de magnésium, le chlorure de sodium, le sulfate de cuivre et d’autres encore. S’ils sont parfois controversés, la clé reste de les utiliser avec précaution, en respectant les doses et les méthodes d’utilisation, car qu’ils soient bio ou non bio, chaque agent chimique possède un degré de nocivité différent et c’est bien la dose qui fait le poison. Enfin, le traitement chimique après la récolte (pour retarder la maturité, par exemple) est interdit en bio.
Afin d’éviter les abus, les produits labellisés bio sont régulièrement contrôlés et nous pouvons également compter sur des acteurs comme Synabio pour mener des actions efficaces afin de développer la bio dans le bon sens.
Enfin, comprenons aussi qu’il y a bio et bio, et que la bio d’aujourd’hui est une étape dans un monde en pleine transition. Toute quête est menée pas à pas, alors, continuons d’avancer.
Par ailleurs, il existe de nombreux labels alimentaires (avec, pour chacun, un cahier des charges différent) et certains d’entre eux, comme biocohérence, garantissent une qualité encore supérieure. Nous t’invitons à te renseigner et à faire ensuite ton choix en conscience.
« Le bio, ça coûte cher ! »
Le bio est-il réservé à une élite ? Et si nous posions l’équation dans l’autre sens ? Est-ce les produits bios qui sont chers ou les produits issus de l’agriculture conventionnelle qui ne le sont pas assez ? Pouvons-nous vouloir une alimentation de meilleure qualité sans que cela impacte le prix ? Fais-en ta propre idée et dis-nous ce que tu en penses en commentaire.
Nous n’allons pas le contredire, le bio affiche bien souvent (pas toujours) quelques euros de plus en bas du ticket de caisse. Explorons-en les raisons :
- En premier lieu, l’agriculture biologique requiert un plus fort besoin de mains d’œuvre, pour un rendement à l’hectare inférieur à l’agriculture conventionnelle : rappelons qu’une des motivations de l’agriculture conventionnelle est en effet d’augmenter le rendement.
- Ensuite, la certification « bio » (et les contrôles) a un coût élevé. Et malheureusement, celle-ci est obligatoire pour être référencé en rayon bio et même si, nous l’avons vu, d’autres labels sont possibles (et le prix de vente de ces produits est souvent moins élevé), ne pas avoir cette certification « bio » prive les producteurs de l’accès à un important canal de distribution.
- Dû à une utilisation plus raisonnée de produits chimiques, les aliments frais issus de l’agriculture biologique se conservent généralement moins longtemps. Il y a donc un quota de perte plus important à combler. Des premières initiatives sont prises par les petits producteurs qui montent des partenariats avec des restaurateurs afin d’écouler leur stock en bonne conscience.
Et puisqu’il est de toute façon plus intéressant de consommer les aliments frais le plus rapidement possible après leur récolte, ces temps de conversation plus courts sont l’occasion pour nous de bénéficier au mieux de leurs vitamines et minéraux.
Cependant, la véritable raison se situe plutôt au niveau de l’offre et de la demande. Mais celle-ci ne cessant d’augmenter en produits biologiques, et grâce au soutien notamment des Fonds Avenir Bio, nous pouvons espérer que le prix du bio diminuera rapidement.
Et si le prix du bio peut rester un frein important pour certains, il en bon de rappeler que le fait de manger des produits issus de l’agriculture biologique diminue les risques de certaines maladies. Le prix à payer pour une bonne santé ?
En attendant, voyons-y l’occasion de donner du sens à nos valeurs en réfléchissant à ce que nous voulons pour nous et notre santé et de mieux consommer en choisissant la qualité à la quantité.
« J’achète bio donc j’achète diététique ! »
En parlant de santé, voici une idée qui persiste au dépend de notre équilibre alimentaire. En effet, la vérité doit être rétablie : non, le bio n’est pas synonyme d’alimentation saine, tout comme choisir des aliments “sans sucre” et “sans gluten” industriels ne nous garanti pas des aliments de qualité.
Bien que, au-delà d’utiliser des produits phyto d’origine naturelle, la bio promet, sur le papier, des produits santé (dans le respect de soi), équitables (des autres) et écologiques (et de la nature), la réalité n’est pas si verte.
En effet, si le label bio avec son épis de blé vert prétend en effet avoir des bénéfices santé, d’un point de vue nutritionnel, un produit bio d’une composition identique à celle d’un produit non bio contiendra autant de sucre, de sel et de gras qu’un produit non bio. Et puisque certains géants profitent de cette idée reçue pour intégrer le marché par une nouvelle porte, ils n’ont pas vraiment intérêt à éclaircir le flou autour de cette question.
De même, même si la réglementation est plus sévère, la bio n’empêche pas certaines dérives de l’industrie comme, par exemple, la déforestation due à la culture d’avocat bio et non bio au Mexique et au Chili (préférons ceux en provenance d’Espagne).
Donc, si le souhait est d’acheter santé, il sera tout aussi nécessaire d’acheter des aliments les moins transformés possibles, composés de bons sucres, de bons gras et de bons sels dans des quantités raisonnables, et de porter une attention particulière à l’équilibre de notre assiette. Cuisiner nous-même reste encore la meilleure garantie de savoir ce que nous mangeons.
Enfin, entre un légume non bio et pas de légumes du tout, manger des légumes reste la priorité.
« Nous ne pouvons pas nourrir toute la planète avec le bio ! »
Au vu des chiffres sur la famine dans le monde, nous pouvons également conclure que l’agriculture conventionnelle ne nourrit pas non plus toute la planète.
Il est vrai, que l’agriculture conventionnelle et les traitements chimiques de synthèse sont apparus après les grandes guerres mondiales, à un moment où la population sortait d’une période de manque. Nous pouvons donc facilement comprendre leur validation de ces procédés qui leur a permis de manger à leur faim. Les produits appliqués avaient pour objectifs de prévenir les maladies et les insectes nuisibles, et de produire de plus grosses quantités d’aliments avec un minimum d’efforts physiques. Malheureusement, l’agriculture conventionnelle contribue à l’appauvrissement des sols (ce qui induit l’utilisation de toujours plus d’engrais) et pollue l’air et l’eau, en même temps qu’il existe, aujourd’hui, une surproduction de denrées alimentaires, quotidiennement gaspillée dans certaines parties du monde. Enfin, une grande partie de la production issue de l’agriculture conventionnelle est aujourd’hui à destination du bétail. Sachant qu’il faut 7 à 8 kg de céréales et de fourrage pour produire 1 kg de viande de boeuf, manger plus de végétaux contribuerait certainement à diminuer la famine, sans compter le rééquilibre environnementale annexe. L’alimentation végétale, plus durable ? Une autre question qui mérite un article à elle toute seule.
Il n’est pas question d’accepter à tout prix la réglementation du label bio, il est en revanche nécessaire de nous reconnecter avec nos valeurs et de nous rappeler le sens de tout ça.Par ailleurs, connais-tu l’agro-écologie ou encore la permaculture ? Ce sont des modèles prometteurs visant à proposer des solutions concrètes pour nourrir la planète écologiquement. En d’autres mots, de travailler avec la nature au lieu de chercher à la maîtriser à tout prix. La permaculture entretient également la biodiversité végétale grâce à la polyculture, ce qui s’avère très important si nous voulons éviter de tomber dans la monotonie de la standardisation. Et les rendements sont, par ailleurs, bien supérieurs à ceux de l’agriculture conventionnelle. Le biomimétisme propose quant à lui de s’inspirer de la nature pour innover et proposer de nouvelles formes d’industries durables (exemple : il n’y a pas de déchets dans la nature).
« Le local, c’est mieux ! »
Ces quinze dernières années, nous rencontrons un boom pour le locavorisme (fait de manger local). 81% des français préfèrent, aujourd’hui, acheter un produit fabriqué en France et 4 français sur 10 consomment souvent des produits locaux.
Initialement, ce mouvement prône la consommation de produits fabriqués dans un rayon restreint autour de son domicile (environ 160 km). Il est toutefois accepté que consommer local s’applique aussi aux produits “de notre région”, “cultivés dans notre pays” et “fabriqués en Europe” pour certains produits que nous ne trouvons pas en France.
Il est certain que manger local présente un impact instantané sur notre responsabilité sociale et environnementale :
- Manger local soutient l’économie locale : à l’heure où les multinationales tentent de maîtriser le marché et les richesses, tout en jouissant des ressources de notre territoire, consommer local nous donne le pouvoir de conserver nos richesses en favorisant le développement d’un écosystème économique, et participe également à la création et au maintien d’emplois.
- Manger local permet de réduire considérablement les intermédiaires et de garantir une meilleure rémunération des producteurs. Toutefois, attention à ne pas confondre circuit de proximité (local) et circuit court. En effet, si le circuit court permet une meilleure rémunération des producteurs par la diminution du nombre d’intermédiaire, il ne prétend pas être local.
- Manger local contribue à diminuer l’impact carbone qu’engendreraient les circuits de distribution classiques : moins de kilomètres parcourus = moins de CO2 émis. Cependant, il est important de nuancer. En effet, il apparaît que consommer local en hors saison peut générer plus de carbone que l’importation. Il nous semble utile d’apporter ici un exemple concret :
Prenons deux tomates bio en novembre. L’une vient de France et l’autre du Maroc. Laquelle choisissons-nous ? La tomate origine France ? Et bien, contrairement à ce que nous pourrions croire, l’impact écologique sera plus important pour produire la tomate de France (utilisation de serres, chauffage, ect) que pour la produire et l’importer du Maroc. Pourquoi ? Car c’est encore la pleine saison là-bas (à condition qu’elles soient produites en plein champs, sous le soleil). Toutefois, nous ne vous garantissons pas qu’elles soient aussi goûteuses puisqu’elles sont généralement cueillies avant maturité pour le transport.
L’empreinte écologique n’est donc pas forcément en lien direct avec l’importation.
En effet, pour calculer l’impact carbone d’un produit, après le mode de production, la saisonnalité importe encore plus que la provenance.
- Manger local réduit les temps d’acheminement des produits et augmente ainsi la qualité nutritive des fruits et légumes qui peuvent être dégustés plus rapidement après la récolte. Le bémol, c’est que manger local ne garantit pas l’absence de stockage. Tournons-nous donc vers les AMAP qui promettent une récolte en flux tendu.
- Manger local permet de sauver un patrimoine végétal et culinaire face à l’uniformisation de notre alimentation.
Pour autant, le manger local ne résout pas la question de la valeur du bio. Et si le manger local contribue à faire émerger une autre logique de production et de distribution, réserver notre consommation exclusivement au local n’apparaît pas comme une solution pérenne. En effet, sans compter l’absence possible de diversité alimentaire, l’excès du local serait l’autarcie : une économie fermée et un isolement qui s’exposerait à des risques en cas de crise sociale ou sanitaire et irait à l’encontre du principe de libre concurrence. Mais puisque ces dérives concerneraient aussi une économie dépendant exclusivement des importations, l’équilibre se trouve dans la mi-mesure.
Une fois de plus, il est utile de consommer en conscience car le locavorisme consiste en réalité plus largement à acheter auprès de producteurs à taille humaine, de privilégier les produits frais, de respecter les saisons et de favoriser le maintien des populations sur notre territoire. Il confirme une volonté de plus transparence, de qualité et de retour à l’humain.
« Bio ou local, que choisir ? »
Bio, local, vegan, avec ou sans gluten, et si nous nous trompions de question ? Comme tu l’as certainement noté, nous n’avons pas cherché à cacher les défauts bien réels d’initiatives qui partent pourtant de bons principes. Tout n’est pas “vert” dans le bio et le local n’est qu’une réponse à certains excès. De plus, chacun associe le « bio » et le « local » à des valeurs différentes selon ses priorités (santé, environnement, type de société).
Soulignons seulement que, derrière tous ces mouvements, ce que nous recherchons, ce sont des produits de meilleures qualités, digestes et vitalisants, produits en conscience, dans le respect de soi, des autres et de la nature ; en bref, des produits qui nous font du bien, tout simplement.
De plus, il n’est pas forcément nécessaire de choisir entre bio ou local. Les chiffres rapportés par l’agence bio nous montrent en effet que 69 % des produits bio consommés en France en 2017 étaient produits en France, et si nous enlevons les produits considérés comme exotiques (banane, cacao, café…), nous passons à 82% !
Ensuite, il est important de ne pas mettre tous les agriculteurs dans le même panier et de se renseigner sur la provenance et le mode de fabrication des produits que nous achetons. En effet, les producteurs locaux, sans pour autant détenir le sésame de la certification bio, offrent le plus souvent une excellente qualité de produits cultivés et fabriqués de manière respectueuse ; quant à l’agriculture conventionnelle, elle souffre des excès de certains géants de l’industrie dont nous découvrons des images inacceptables à travers des reportages mettant en lumière les conditions et les conséquences désastreuses qu’ils pratiquent : mono-cultures industrielles, déforestation massives, transformations douteuses, maltraitances animales, etc. ; par ailleurs, l’appellation bio ou local n’empêche pas la pratique d’une agriculture intensive.
Heureusement, de nombreuses initiatives se mettent en place et proposent un avenir enthousiaste : fermes de permaculture, agro-écologie, réseaux de producteurs indépendants, initiatives locales, créations de labels, émergence des AMAP (Association pour le Maintien de l’Agriculture Paysanne), etc.
Finalement, pour revenir à la question du titre de cet article, l’agriculture biologique et la consommation de produits bios apparaissent comme des clés pour répondre aux défis environnementaux, et d’autres mouvements apparaîtront, tant que nous ne serons pas suffisamment en confiance.
En attendant, fais de ton mieux en fonction de tes convictions. Et, au-delà de s’interroger sur la question de manger bio ou local, n’oublions pas d’avoir une alimentation équilibrée, variée, de saison et non transformée, de pratiquer une activité physique régulière et d’apprendre à réguler notre stress dans un monde qui va de plus en plus vite. Un monde meilleur, ça commence par soi.
Quel rôle les entreprises peuvent-elle jouer dans une époque en pleine mutation ? Est-il possible d’intégrer une alimentation saine et durable en entreprise ? Comment donner du sens à sa politique RSE et agir dans le respect de chacun et de la nature ? Ce sera le sujet de notre prochain article.
Elisabeth Smeysters
CEO de Myyaam
et
Marion La Porte
Nutritionniste
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